(Une attitude de Trump lors de sa première conférence de presse comme président-élu lundi 16 décembre en sa résidence de Mar-a-Lago, en Floride)
À l’approche du cyclone nommé Trump, on observe un bouleversement radical des mentalités.
On rapporte aussi qu’avec Trump aux portes de la Maison Blanche, un « remords des acheteurs » se serait soudain emparé de certains de ses électeurs.
Et si l’homme était pour de vrai le « facho » dénoncé par les Démocrates ? Et si le «Projet 2025» pouvait nous replonger dans l’obscurantisme de « Jim Crow »?
Les citoyens se rendent aussi soudain compte de l’immensité du pouvoir entre les mains d’un président des États-Unis (Régis Debray dit que les Grecs l’appellent le «Planétarque», le maître de la Planète). Et, surtout, un président vindicatif. Une autre équation terrifiante se formule: et si les institutions ne résistaient pas aux coups de boutoir du test de résistance permanent de Trump lors des quatre prochaines années ?
Les membres de l’élite médiatique et de la technologie sont les premiers à tirer leur épingle de ce jeu funeste—en fléchissant préventivement le genou en hommes (ou dames) liges, le « bending of the knee » qui définit soudain le nouveau régime de Trump.
Mika Brzezinski et son mari Joe Scarborough de la chronique politique matinale « Morning Joe » de la chaîne MSNBC ont les premiers déclenché la ruée sur Mar-a-Lago du côté médiatique et Mark Zuckerberg, menacé directement par Trump, du côté de la Silicon Valley (avec des donations en millions de dollars au comité de l’inauguration de Trump).
(Mika Brzezinski et Joe Scarborough sur le plateau de « Morning Joe »)
Mais, en amont, il y a eu les milliardaires Jeff Bezos et Dr. Patrick Soon-Shiong—respectivement propriétaires du «Washington Post» et du «Los Angeles Times»—, qui ont interdit à leurs journaux la publication les éditoriaux des comités de rédaction en faveur de la candidature de Kamala Harris.
Sans évidemment oublier Elon Musk et les autres, une oligarchie des « techies »…
La plus notoire de toutes ces compromissions est l’arrangement à l’amiable inutile de 16 millions de dollars conclu entre la chaîne ABC et Trump: 15 millions pour sa fondation présidentielle et 1 million pour les frais de ses avocats.
Trump avait intenté une action en diffamation « avec « intention effective de nuire » contre cette chaîne de télévision et le présentateur George Stephanopoulos.
Stephanopoulos avait affirmé lors d’une émission que Trump avait été « jugé responsable du viol » d’E. Jean Carroll—ce que Trump continue à contester Trump.
Pourtant, le juge Lewis Kaplan, qui avait jugé l’affaire de l’accusation de viol de Carroll contre Trump, déclarait en avril 2023:
Les conclusions selon lesquelles Mme Carroll n’a pu prouver qu’elle avait été «violée» par Trump dans le sens du Code Pénal de New York ne signifie pas qu’elle n’a pu prouver que M. Trump l’a «violée» comme beaucoup de gens entendent communément le mot « viol ».
Quoi qu’il en soit, refusant peut-être de donner le flanc à des attaques de Trump durant sa présidence, malgré la forte probabilité que la chaîne avait de gagner au procès, les dirigeants de ABC ont choisi de caresser le futur président dans le sens du poil—au grand dam de Stephanopoulos, sommé de présenter des excuses à Trump.
(Trump et George Stephanopoulos)
Cette décision malvenue de ABC aura peut-être enhardi Trump, pour qui la presse est l’ «ennemie du peuple». Car il vient justement d’intenter un autre procès contre un autre groupe médiatique, le «Des Moines Register», le quotidien historique de Des Moines, la capitale de l’État de l’Iowa.
Le « Des Moines Register » et l’entreprise de sondages d’Ann Selzer sont accusés par Trump d’«interférence électorale flagrante» pour avoir publié un sondage donnant une avance de 3 points à Kamala Harris le 2 novembre.
À en croire les avocats de Trump:
Les parties défenderesses et leurs cohortes au sein du Parti Démocrate espéraient que le sondage Harris allait créer un faux narratif d’inévitabilité en faveur de Harris au cours de la semaine finale de l’Élection Présidentielle de 2024.
Pour son propre camp, Trump impose le kowtow, la prosternation protocolaire de déférence aux pieds de l’Empereur adoptée dans la cour impériale chinoise au IIIe siècle av. J.-C.
Et gare à celle ou celui qui oserait enfreindre le kowtow.
Comme le fit Jeff Sessions, le ministre de la justice viré par Trump pour avoir nommé le procureur spécial Robert Mueller pour enquêter sur l’interférence russe dans la première campagne de Trump.
Lors de la primaire de la campagne sénatoriale de l’Alabama en 2019 à laquelle il participait pour tenter de récupérer le siège qu’il avait abandonné lors de sa nomination comme ministre de la justice, Sessions avait choisi la flagornerie ouverte pour amadouer Trump, l’appui de ce dernier étant devenu la condition sine qua non pour obtenir le vote des MAGAs.
Mais Trump était resté de marbre, lançant aux journalistes ce qu’il pensait du ton de thuriféraire adopté par Sessions dans une vidéo de publicité politique:
Ouais, ouais, j’ai vu la publicité, je l’ai vu ramper, m’implorer, se mettre à plat ventre et tout le toutim. Mais il doit faire le kowtow, littéralement, comme les Chinois le faisaient devant leurs empereurs… qui se cognaient la tête jusqu’au sang! C’est alors qu’on avisera.
Récemment, pour s’assurer le kowtow des élus Républicains dans les votes de confirmation au Sénat en janvier prochain de certaines personnalités controversées choisies pour assumer des fonctions ministérielles, Trump et ses opérateurs politiques agitent la menace des primaires pour faire barrage aux récalcitrants;
Pour Trump et certains de ses plus fidèles partisans, les législateurs Républicains ont raison d’être terrifiés par son intervention aux primaires parce qu’il peut à lui seul dicter les résultats: il commande aux électeurs des primaires pour qui voter et ils obéissent à ses instructions.
Le refrain des élus Républicains est donc: «Au pas, camarades! »
Mais parmi ces législateurs Républicains, il y a deux sénatrices qui ne sont nullement impressionnées par ces menaces: Lisa Murkowski de l’Alaska et Susan Collins du Maine. Les deux modérées ont voté pour la destitution de Trump après l’attaque du Capitole par les MAGAs le 6 janvier 2021. Et en novembre 2022, Murkowski a battu à plate couture une candidate appuyée par Trump.
(Les sénatrices Républicaines Lisa Murkowski de l’Alaska, à g., et Susan Collins du Maine)
https://www.nbcnews.com/news/amp/rcna184494